Telle est la parole qui accompagne le grand geste du baptême (évangile selon Matthieu, ch.28, verset 19) et qui ouvre chacune des liturgies chrétiennes, tout spécialement la fête de la Sainte Trinité en ce mois de juin : Nous marchons vers le Père, par le Fils, dans l’Esprit.
Nous marchons vers le Père. Le Père… mystère d’un Dieu origine et source de l’univers et de tout homme… mystère d’un Dieu qui crée l’homme à son image, l’enveloppant de son amour. Voilà qui me met en communion avec tout homme, croyant ou non, qui lui aussi est aimé de Dieu…. mystère d’un Dieu qui veut le bonheur de l’homme et n’est en rien jaloux de ses succès et réussites, Lui qui l’a doté de l’intelligence et d’un cœur pour aimer.
Le Père… mystère d’un Dieu invisible, qui est « au ciel », c’est-à-dire bien au-delà de tout ce qu’on peut dire de Lui dans nos pauvres mots d’hommes… mystère d’un Dieu que l’on ne peut pas posséder, qu’on a jamais fini de connaître. Ceci me met en communion profonde avec tous les hommes de par le monde en quête de spirituel, qui pressentent – maladroitement peut-être – qu’il y a quelque-chose ou quelqu’un au -dessus de nous ».
Le Père… mystère d’un Dieu qui met en marche et appelle les hommes, les précédant et les enveloppant de son amour. La foi, pas un savoir, mais une histoire, un chemin. Et cela me met en profonde communion avec mes frères Juifs et Musulmans qui eux aussi reconnaissent qu’il n’y a qu’un seul Dieu… et que ce Dieu n’est pas un principe théologique, une vague déité ou divinité, mais Quelqu’un qui a créé l’homme pour en faire son vis-à-vis. Oui, nous marchons vers le Père, et, chemin faisant, nous découvrons de nombreuses solidarités !
En marchant vers le Père, nous n’avançons pas tout-à-fait à l’aveuglette : le Christ nous fournit quelques balises. Nous marchons vers le Père par le Fils.
Le Fils… mystère d’un Dieu qui se fait proche, qui vient vers nous sans nous donner le temps de chercher le meilleur moyen d’aller vers lui !… d’un Dieu qui a pris visage humain (« Qui m’a vu a vu le Père » , dit Jésus à Philippe). Voilà qui nous invite à prêter attention aux Écritures qui lui rendent témoignage !
Le Fils… mystère d’un Dieu vulnérable par amour. Dieu ne pouvait pas souffrir… Voici qu’en Jésus, Dieu, par amour, accepte de souffrir et même de mourir ! Et voici une deuxième balise sur notre route : l’amour du prochain visible comme critère de vérification de l’amour de Dieu invisible !
Nous marchons vers le Père, par le Fils… et dans l’Esprit !
L’Esprit… mystère d’un Dieu qui travaille les hommes de l’intérieur, qui suscite notre émerveillement et fait de nous des contemplatifs !
L’Esprit… mystère d’un Dieu fidèle qui assiste l’Église pour qu’elle traduise l’Évangile dans un contexte toujours nouveau… mystère d’un Dieu qui nous délivre de l’obsession de la lettre du précepte pour faire appel à notre conscience et éduquer notre liberté et notre responsabilité !
L’Esprit… mystère d’un Dieu plein d’humour, qui signe son passage par la paix et la joie… une joie, dit Jésus, que rien ni personne ne pourra nous ravir.
Nous marchons vers le Père, et cela nous ouvre à des solidarités insoupçonnées… Nous cheminons par le Fils, et cela nous procure quelques balises pour guider notre route… Nous cheminons dans l’Esprit, la force et l’amour même de Dieu qui nous empêche de céder au découragement…
Le Père, le Fils et l’Esprit, un singulier pluriel qui, tels les trois hôtes d’Abraham, quémande(nt) aujourd’hui notre hospitalité. Avec eux donc, goûtons cette halte et refaisons nos forces dans ce repas de l’eucharistie, avant de reprendre notre marche vers le Père, par le Fils, dans l’Esprit.
Philippe LOUVEAU, prêtre à Villejuif