Cette soirée qui s’est tenue s’est déroulée à la salle paroissiale de l’Église catholique à Villejuif devait permettre une premier échange autour du thème de l’année 2018 qui se rapporte à l’Écologie.
La question principale choisie comme fil conducteur est : « Quelle place nos religions prennent-elles dans le grand débat sur l’avenir de la planète ? » Deux questions ont été débattues :
- Pouvez-vous identifier dans votre religion des principes se rapportant à la protection de notre planète ?
- Vous est-il arrivé dans votre conduite quotidienne de faire des choix écologiques inspirés par vos convictions religieuses ?
Voici une synthèse des retours de trois groupes de discussion qui se sont constitués.
Premiere question : Pouvez-vous identifier dans votre religion des principes se rapportant à la protection de notre planète ?
La Bible (la Tora et le Nouveau Testament) et le Coran contiennent des principes qui ont un lien avec la protection de la planète. Ils enseignent que Dieu est créateur du ciel et de la terre. Ainsi, la terre ne nous appartient pas. Les humains ont surtout mis en avant l’ordre que Dieu nous a donné : dominer la terre. Une mauvaise compréhension de ce verbe a conduit à l’anthropocentrisme. Mais Dieu nous a aussi ordonné de cultiver la terre, de la garder, d’en prendre soin. Il faut donc rendre la terre féconde et non l’épuiser, laisser vivre les animaux et les plantes et non les accaparer. Les traditions juive, chrétienne et musulmane incitent au respect de tout ce qui est créé par Dieu et découragent le gaspillage. Puisque les adventistes (une branche du protestantisme) ne mangent pas la viande, est-ce écologique ? On doit rendre beau ce qui existe et l’utiliser dans le sens du bien. Nous avons à remercier Dieu pour le don de la création et pour tout ce qu’il nous offre. Nous ne devons pas gaspiller, non seulement la nourriture, mais aussi les vêtements parce que les gens qui les confectionnent dans les pays pauvres souffrent.
Dans l’épître aux Romains, l’apôtre Paul dit que la création souffre. Il faut entendre à la fois les cris de la terre et les cris des pauvres, qui sont abandonnés à leur triste sort. Tout cela doit être articulé. Dans le christianisme, Saint François d’Assise est un modèle de l’amour de la création. On tient d’autant plus aux choses qu’elles nous émerveillent. Tout est lié, mais tout est fragile. On doit travailler pour vivre et Dieu nous considère comme des ‘’vicaires’’ sur cette terre, des gestionnaires. Les non-croyants nous rappellent que nous sommes co-créateurs. Cela va dans le sens de l’Encyclique du Pape François, Laudato Si, qui déclare que nous sommes à la fois responsables et co-créateurs puisqu’il nous faut poursuivre la création. Il y a aujourd’hui une éducation à refaire. Pour protéger la terre, il ne faut pas jeter n’importe quoi, n’importe où.
Le Coran commande le respect de la nature, elle est la seule justice. Les plantes et les animaux doivent être protégés. Il ne faut pas détruire les arbres sans nécessité. En cas de guerre, les soldats ne doivent ni tuer les animaux ni détruire les arbres. On va en enfer si on maltraite les animaux. Dieu nous a dit de prendre de tout sans faire de gâchis. Il faut remplir l’estomac de façon modérée. Il ne faut pas tuer si ce n’est pas nuisible. Et puis il y a des interdits alimentaires. On ne doit manger que les animaux herbivores et non les animaux carnivores ni les bêtes à sabots. Ce genre d’interdits se trouve également dans la Tora. Mais, avec Jésus, les chrétiens sont libérés de tout cela. Jésus a déclaré que ce n’est pas ce qui rentre dans la bouche qui souille, mais ce qui en sort.
Dans l’islam, il est recommandé de renouveler les arbres, il ne faut pas les brûler. Un vieil homme qui plante un arbre plante pour les autres. Celui qui plante un arbre aura une récompense de Dieu sur quiconque mangera ses fruits. Même si l’heure de la fin du monde arrive, si on a une fleur à la main, il faut la planter. Celui qui enlève un obstacle sur la route réalise une aumône. Quand Dieu a créé la terre, il a donné de l’eau, qui est la source de vie de tout être vivant. On ne doit pas la gaspiller ni la salir. On ne doit pas utiliser plus d’un litre d’eau pour les ablutions, même devant un fleuve. Il est très important d’observer la nature et l’Histoire. Si on comprend comment la nature est faite, on peut comprendre la puissance de Dieu.
Deuxième question : Vous est-il arrivé dans votre conduite quotidienne de faire des choix écologiques inspirés par vos convictions religieuses ?
La dimension humaine peut en effet inspirer nos actes. En tant qu’être humain, peu importe ses convictions religieuses, on doit avoir le souci des autres. Il existe des régions qui manquent d’eau ou qui n’en ont pas assez. Le rôle de l’éducation est d’apprendre le respect qui nous fait poser des gestes pour en prendre soin, la rendre propre. Selon les musulmans, il faut faire très attention à l’utilisation de l’eau pour les ablutions : il y a des gestes précis pour éviter le gâchis. On n’a pas le droit d’ouvrir le robinet d’eau à fond. On a entendu le témoignage d’une personne qui a vécu la situation du Honduras avec la destruction des ressources en eau et son gaspillage par les grands planteurs. Elle avait participé à la sensibilisation de la population. Suite à cette mobilisation, on est arrivé à empêcher de continuer à planter des champs à grande échelle dans cette région. En fait, quand on protège l’eau, on protège les gens.
On a aussi évoqué le cas du Nigeria. En 2001, la Commission africaine a été saisie par deux ONG (organisation non gouvernementale), nigériane (Social and Economic Rights Action Center) et américaine (Center for Economic and Social Rights), pour la violation du droit à l’alimentation au Nigeria. Elles ont porté plainte auprès de cette Commission pour défendre le peuple ogoni contre la société pétrolière nationale et la compagnie Shell qui, avec la complicité du gouvernement, détruisaient les terres et les ressources en eau de ce peuple. La Commission africaine a conclu que le gouvernement du Nigeria avait l’obligation de respecter et de protéger le droit à l’alimentation du peuple ogoni, y compris contre l’activité des entreprises pétrolières. L’affaire a été suivie par des ONG nationales et internationales, et une campagne médiatique a obligé Shell à quitter le Nigeria.
À cause de leur foi, des gens qui ont participé au débat font le choix d’acheter des produits du commerce équitable : il s’agit de rendre justice aux personnes qui travaillent dans les pays pauvres. L’écologie et la dimension sociale sont en effet liées. Il faut entendre les cris des pauvres et les cris de la terre : c’est le sens de la justice. On a aussi signalé l’importance du compost et de la qualité de toit des maisons. L’islam, qui n’y était pas tellement sensible dans le passé, pousse les croyants dans ce sens. On a entendu le témoignage d’une personne qui a choisi l’essence par rapport au diesel pour sa voiture pour être logique et préserver la nature et la santé. Il l’a fait avec plus de conviction et de conscience. Pour les déplacements, on a parlé de la marche à pied et des moyens de transport en commun. On a soulevé la question du trafic aérien dans le monde qui ne cesse d’augmenter. Selon les prévisions, il va doubler d’ici dix ans.
Dans l’islam, quand on doit aller prier, il faut y aller à pied ; à chaque pas qu’on fait on s’élève. La préservation de l’humanité est une obligation religieuse : préserver sa santé et soigner son corps parce qu’il ne nous appartient pas, la vie nous est confiée. Des savants religieux ont déconseillé et interdit la cigarette jugée nocive pour la santé. C’est d’accord avec le fait qu’on doit préserver l’humanité et qu’on est appelé à prendre soin de sa vie, mais quelqu’un a dit que, pour lui, c’est de l’ordre de l’inspiration plus que de la prescription. On a insisté aussi sur le nettoyage de nos maisons et de nos habits, car quand on salit le corps, on salit l’âme. Il faut se pencher sur la question du péché, de notre relation à Dieu. Le problème des OGM (organisme génétiquement modifié) a été soulevé et celui de la non-consommation de la viande. Ce n’est pas seulement une question d’économie. On doit vivre dans la sobriété et même jeûner. La sobriété n’est pas uniquement une question de consommation.